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partage des pensées

GREVE DES PARAMEDICAUX 
 
serment d'Hippocrate ou d'ivrognes? 
(112 décès au CHD Abomey) 
 
Selon des chiffres officiels, 112 personnes sont décédées en huit semaines de grève au Centre hospitalier départemental de Goho à Abomey. Des chiffres qui directement mettent en cause la grève des paramédicaux et des administratifs du secteur de la santé ; une grève démarrée depuis le 17 mars dernier et qui aura duré 70 jours. 
 
Pendant toute cette période, les mardis, mercredi et jeudi ne comptaient plus parmi les jours de travail des paramédicaux et du personnel administratif des structures sanitaires non seulement dans le Zou et les Collines mais aussi dans tous les autres départements hormis l’Atlantique et le Littoral ; une grève sous-tendue par le même mobile, à savoir, le non paiement par l’Etat de diverses primes. Certes, si tous ces décès ne peuvent être imputables à cette grève, il est évident qu’elle y a contribué pour une grande part. Les grévistes le reconnaissent. C’est sans compter, révèle-t-on, tous ceux qui tous les jours perdent la vie dans l’intimité de ces cabinets de soins médicaux, qui ces dernières années ont poussé comme de petits champignons dans les coins de rue où les aide-soignants et, au mieux, les infirmiers et sages-femmes ont confisqué les prérogatives des médecins et autres chirurgiens. Des « cabinets »qui depuis toujours avaient cette réputation de mouroirs mais qui, avec la grève, se sont révélés les ultimes recours des malades, malheureusement sans que leurs propriétaires ne puissent véritablement hausser la qualité de leurs prestations. Tenus pour les plus nombreux par des mains sans qualification requise, alors, ils ont incontestablement prouvé ces dernières semaines leurs limites comme ce cabinet situé dans le deuxième arrondissement de la ville de Dassa. Une infirmière y a opéré un malade atteint d’une hernie. Le nommé Job Yètè, un sexagénaire, y est décédé dans les suites opératoires. Au moins ce cas a fait l’objet d’un rapport du directeur départemental de la santé du Zou et des Collines au ministre de la Santé. Le cabinet de soins mis en cause a été fermé. Ailleurs, c’est une fillette de deux ans qui, pour un mal apparemment bénin, a été malmenée pendant quatre semaines à travers des soins inadéquats faits de piqûres multiples et inappropriées par une infirmière. Fille d’un cadre en service dans la localité, celle-ci n’a dû son salut qu’aux relations de son père. Un médecin pédiatre lui a été recommandé et l’administration d’un simple antibiotique accompagné de lavages de bouche a été suffisante pour la tirer d’affaire. De la même manière que beaucoup d’autres cas ne peuvent sortir de l’anonymat, de nombreuses personnes ont été sûrement contraintes à l’automédication et ont dû en subir les conséquences désastreuses. On n’en connaîtra jamais le nombre. Si ce n’est la certitude de l’ampleur en termes de masse et de rythme de ces décès. 
Sacrifices humains 
C’est dire combien cette grève a été meurtrière pour les plus pauvres, notamment ceux qui ne peuvent pas se permettre le luxe d’aller consulter un spécialiste en milieu privé. Malgré la disparition d’un des leurs, un administratif du Chd Goho, décédé des suites d’une crise d’hypertension artérielle, les grévistes n’hésitent pas à réaffirmer la radicalisation de leur mouvement. L’histoire retient qu’ils n’auront même pas eu une pensée pour ces parturientes en l’honneur de qui, quelques jours plus tôt, le gouvernement a décrété la gratuité de la césarienne. En effet, le 1er avril, le gouvernement a mis en vigueur son plan d’allègement de la facture de la césarienne ; une première dans l’assistance sociale et médicale au Bénin, mais dont les populations n’ont pu pleinement jouir pendant les dix semaines qu’a duré cette grève. En plus, il y a cette femme qui a donné naissance à un petit garçon le jeudi 14 mai dans le jardin jouxtant la maternité du Chd de Goho. La grève aussi est passée par là. A l’instigation de leur syndicat, les jours de grève, des contrôles incessants étaient opérés dans tous les services de cette formation sanitaire. L’objectif étant, signale-t-on, de faire observer cette grève dite sans service minimum. Même la campagne de soins opératoires gratuits offerts par la Banque islamique de développement aux Béninois atteints de la cataracte et d’autres affections visuelles et qui devait se dérouler au Chd de Goho a été sérieusement perturbée au point où les interventions chirurgicales et les soins post -opératoires ont été déplacés vers l’hôpital de zone de Zagnanado et le centre de santé de Davoungon. Vu les menaces qui planaient sur cette campagne, le directeur départemental de la santé du Zou et des Collines, M. Thossa Avessè s’était trouvé contraint de faire assurer par la police la sécurité des membres de l’équipe médicale chirurgicale. Cela n’avait pas suffi pour faire démordre les meneurs de cette grève impitoyable puisqu’ils ont trouvé le moyen, alors que les malades étaient attendus au bloc opératoire, de les empêcher d’y avoir accès. Ceux des agents de santé réquisitionnés ou qui s’étaient proposés pour aider les chirurgiens ont eu leur part de menaces de bains à l’acide. Par ailleurs, lorsque le compteur et le groupe électrogène ont été tour à tour disjonctés, la direction départementale de la santé du Zou et des Collines s’était donc rendue à l’évidence de l’impossibilité de faire du Chd Goho la base de cette campagne. D’où la délocalisation qui s’en est suivie et les malades transportés et répartis avec les véhicules de la police et de la gendarmerie. 
Le serment d’Hippocrate en souffrance 
Le comble est que face à ce qu’ils qualifient de mépris, d’injustice et d’exclusion de la part du gouvernement, les paramédicaux n’ont curieusement fait aucune place au serment d’Hippocrate. Doit-on répondre à une injustice par une autre injustice ? Les témoins de l’altercation qu’ont eu, le 12 mars, au lancement de leur mouvement de grève, leurs représentants avec le préfet des départements du Zou et des Collines, Armand Maurice Nouatin, ont donc pu s’en convaincre. Première autorité politico-administrative départementale, le préfet s’employait à leur rappeler ce serment et la nécessité d’observer un service minimum quand ils s’en sont pris à lui et ont aussitôt radicalisé leur mouvement de grève en rejetant catégoriquement le principe sacro-saint du service minimum. Pour donner la preuve de leur jusqu’au-boutisme, les grévistes ont été instruits par leur hiérarchie syndicale pour ne pas admettre les réquisitions. Une attitude qui exposait leurs auteurs à de lourdes sanctions administratives pour faute professionnelle grave ou insubordination, a révélé un administrateur du travail. En effet, selon la loi n° 2001-09 du 21 juin 2002 portant exercice du droit de grève en République du Bénin, « les fonctionnaires et les agents des établissements publics, semi-publics ou privés à caractère essentiel dont la cessation totale de travail porterait de graves préjudices à la sécurité et à la santé de la population sont tenus d’assurer un service minimum obligatoire ». La vérité, fait-on remarquer, est qu’avec la radicalisation de cette grève perlée, aucun projet de sanction voire les défalcations ne les a fait frémir. Visiblement, c’est dans la quête de conditions atténuantes qu’ils renvoient aux autorités, sous le prétexte de vice de forme, la responsabilité de l’échec des procédures de réquisition. Pour preuve, plus de dix semaines après le lancement de leur mouvement, des banderoles avec des messages réitérant le refus d’un service minimum, sont apparues à l’entrée de la plupart des formations sanitaires. Plus tard, relativement à la question du droit des usagers des hôpitaux publics à ce service minimum, un responsable syndical se réfugiera derrière la thèse selon laquelle la radicalisation d’un mouvement de grève exclut, pour eux, les compromissions. « La santé tout comme la sécurité étant des secteurs extrêmement sensibles, le gouvernement devrait tout faire pour y empêcher les grèves. C’est pourquoi nous ne ferons pas de service minimum ». 
L’Etat, est-il coupable ? 
Les grévistes exigent le paiement sans délai des primes spécifiques, de motivation, de rendement et de risques aux paramédicaux et aux administratifs. Au tableau de leurs revendications figurent aussi l’accélération du processus devant aboutir à la correction des disparités catégorielles et l’aboutissement sans délai des travaux de la Commission de reversement en agents contractuels de l’Etat, des agents contractuels des hôpitaux publics, ceux des financements communautaires ainsi que les agents sur mesures sociales et agents dits Pip. Consacrée par l’arrêté interministériel N° 2348/Ms/Mef/Dc/Sgm/Drh/Drfm/Sa du 29 avril 2008, la page de la prime de motivation allouée aux personnels de toutes les structures du Ministère de la Santé aurait été tournée par le gouvernement au moyen, dénonce-t-on, d’une gymnastique olympienne. En effet, les fonds destinés à les payer ont été utilisés pour satisfaire une autre catégorie d’agents. Au début de cette grève, révèle-t-on, plus de quatre mois s’étaient écoulés au-delà du délai fixé par le président Boni Yayi pour régler les questions liées à la prime de risques. Les médecins d’hôpitaux perçoivent 106.000 F de primes de risques et les autres médecins 56.000 F, alors que, dénoncent-ils, les paramédicaux et les administratifs sont laissés à leur sort. Ainsi, tout le tort, les grévistes l’imputent au gouvernement qui, selon eux, ne fait rien pour se racheter. Outre les pourparlers restés sans suite, semble-t-il, depuis la mi-avril, plus rien. Visiblement, le ministère de la Santé reste sourd aux cris de détresse et des grévistes et de la population. Si ce n’est pas le cas, rien, en tout cas, ne permet de soutenir la position contraire. Ainsi, il est loisible de constater qu’en instituant les primes aux agents de l’Etat, le gouvernement partage avec les grévistes des armes qu’il manipule mal en répondant par le silence voire le mépris à une situation d’injustice pourtant criarde. Pour cette raison bien évidente, il partage aussi autant que les grévistes, la responsabilité du malaise qui s’est emparé du système sanitaire béninois et qui a occasionné de sérieux dégâts dans les ménages. Il apparaît donc que si beaucoup de Béninois sont morts au cours de ces dix dernières semaines dans l’indifférence, c’est parce qu’en feignant d’ignorer les travailleurs des hôpitaux publics, l’Etat s’est rendu coupable de violation des droits de ses travailleurs et cautionne, par delà tout, une réplique se traduisant, elle aussi, en des termes qui s’accommodent très peu du droit aux soins de santé. « Ce n’est pas nous. C’est l’Etat ! », lance à juste titre et sans sourciller Athanase Akoha, le secrétaire général du syndicat des travailleurs du Centre hospitalier départemental du Zou/Collines (Syntra-Chd Z/C). La lueur d’espoir apparaîtra à Natitingou le mardi 26 mai soit 70 jours après le début de cette grève avec l’assurance donnée par le ministre de la Santé que tous les agents de santé seront payés et que le gouvernement était en train de prendre les dispositions pour le faire. Issifou Takpara qui a touché du doigt les conséquences désastreuses de cette grève, a même imploré les sages et leaders d’opinion pour qu’ils intercèdent pour le gouvernement auprès des syndicats des grévistes.  
 
 
 

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Modifié en dernier lieu le 3.06.2009
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